En bref:
- À partir du 1er mai 2025, la quasi-totalité des régions françaises mettront fin à l’exonération de la carte grise pour les véhicules électriques, augmentant significativement leur coût d’immatriculation.
- Cette décision fait suite à un manque à gagner fiscal important pour les régions, mais risque de freiner la dynamique de transition énergétique et ralentir l’adoption des voitures électriques.
- Des mesures complémentaires, telles que le renforcement du bonus écologique et le soutien à l’infrastructure de recharge, sont nécessaires pour maintenir l’attractivité de l’électrique.
Dès le 1er mai 2025, la carte grise des véhicules électriques deviendra payante dans quasiment toutes les régions françaises, marquant un tournant abrupt dans la politique d’incitation à la mobilités propre. Seule la région des Hauts-de-France choisit, pour l’instant, de conserver l’intégralité de l’exonération. Cette évolution fiscale, loin d’être anodine, interroge sur ses effets réels pour la transition énergétique en France et sur l’impact potentiel sur le marché de l’électrique.
📌 Contexte d’une mesure symbolique désormais révolue
Depuis 2020, les pouvoirs publics avaient mis en place une série d’incitations pour accélérer la transition énergétique du parc automobile français. Parmi elles, l’exonération totale de la taxe régionale sur le certificat d’immatriculation (carte grise) représentait un signal fort vers une mobilité « zéro émission ».
Résultat tangible de ces efforts : en 2019, les véhicules électriques comptaient à peine pour 1,7 % du marché automobile neuf pour 1,7 % du marché automobile neuf. Six ans plus tard, fin 2024, cette part atteint désormais 17 %. Une progression remarquable mais coûteuse pour les régions, confrontées parallèlement à une baisse générale des immatriculations de véhicules neufs.
🛑 Pourquoi les régions mettent-elles fin à l’exonération ?
La fin progressive des immatriculations thermiques (essence et diesel), auparavant principales contributrices en matière fiscale, a largement fragilisé les finances régionales françaises. La carte grise représente en effet la troisième source de revenus fiscaux des régions, juste derrière la TVA et la TICPE.
Quelques chiffres pour illustrer l’ampleur du manque à gagner :
- En Occitanie par exemple, le manque à gagner lié aux immatriculations électriques était estimé à 24 millions d’euros par an.
- Globalement, l’exonération concernait 65 % du marché automobile en 2024, plaçant les finances régionales sous pression.
Face à ces pertes de revenus, le projet de loi de finances 2025 a offert aux régions la possibilité de réintroduire partiellement ou totalement la fiscalité sur les voitures électriques. Hormis les Hauts-de-France, toutes les régions ont opté pour un rétablissement intégral. Un choix lourd de conséquences.
🔥 Jusqu’à +3 400 % : un coût désormais significatif pour les automobilistes
Le tarif moyen du cheval fiscal variant entre 30 € et 60 €, les hausses appliquées changent radicalement la donne pour les futurs propriétaires de véhicules électriques :
Modèle | Avant le 1er mai 2025 | Île-de-France | Normandie |
---|---|---|---|
Renault 5 E-Tech (5 CV) | 13,76 € | 288,51 € | 313,76 € |
Tesla Model Y (8 CV) | 13,76 € | 453,36 € | 493,76 € |
Ces augmentations impressionnantes oscilleront selon les régions entre 150 et près de 750 € pour certains véhicules populaires. Autant dire que l’inscription administrative deviendra désormais un poste de dépense bien identifié dans les budgets d’achat, y compris sur les modèles d’occasion.
⚡️ Électrique : entre ambitions nationales et réalités budgétaires locales
Cette évolution intervient dans un contexte déjà fragilisé pour la voiture électrique en France :
- Ralentissement des ventes dû à la baisse notable des aides à l’achat.
- Une attractivité toujours limitée, notamment auprès des ménages modestes et péri-urbains, pour qui le ticket d’entrée vers l’électrique s’avère souvent trop élevé.
- Une infrastructure de recharge publique encore insuffisante pour répondre à une demande en croissance lente mais continue.
Ainsi, la réintroduction de cette taxe pourrait accentuer la prudence des automobilistes. Yves Carra, porte-parole de l’association Mobilité Club France, résume la situation : « Dans quasiment toutes les régions, le cheval fiscal a augmenté en début d’année. Maintenant, on fait payer les voitures électriques. »
📢 À retenir : Si les constructeurs ont jusque-là su tirer profit des incitations fiscales généreuses, ce retournement brutal risque désormais d’impacter négativement leurs ventes à court terme.
🔄 Quelles alternatives et leviers pour maintenir l’élan de la transition ?
Face à cette nouvelle situation, plusieurs pistes pourraient être envisagées afin de ne pas briser la dynamique engagée ces dernières années :
- ✅ Renforcement ciblé du bonus écologique : recentrer les aides financières directes sur des modèles plus accessibles économiquement.
- ✅ Soutenir l’infrastructure : accélérer l’installation de bornes de recharge publiques pour rassurer les automobilistes encore hésitants.
- ✅ Incitations fiscales différenciées : encouragement spécifique aux entreprises et aux professionnels, qui restent aujourd’hui les principaux moteurs de l’achat électrique (via des exonérations de TVS, entre autres mesures).
💡 Conseil d’expert : Une mesure isolée de suppression d’avantages fiscaux ne peut fonctionner sans accompagnement stratégique vers l’électrique. Les pouvoirs publics doivent, pour maintenir l’impulsion environnementale, engager une véritable réflexion d’ensemble afin de rendre la voiture électrique définitivement attractive pour une majorité significative d’automobilistes.
La fin de la gratuité de la carte grise incarne donc à la fois un défi de taille et un réel enjeu du pilotage public : celui d’une transition énergétique qui doit conjuguer impératifs budgétaires régionaux et ambitions nationales écologiques. Entre désillusion et prise de conscience financière, l’avenir du secteur électrique dépendra désormais étroitement des choix législatifs et fiscaux menés durant les prochaines mois.