En bref:
- Les nouveaux tarifs douaniers américains de 25 % % sur les véhicules importés perturbent gravement l’industrie automobile européenne, notamment pour Stellantis et Renault.
- Le Royaume-Uni répond avec une stratégie de soutien à son industrie, maintenant l’objectif d’une transition vers des véhicules zéro émission d’ici 2030, malgré des adaptations pragmatiques.
- La situation actuelle pourrait accélérer la transition énergétique en Europe, nécessitant une réévaluation des chaînes de production et d’approvisionnement des constructeurs automobiles.
L’industrie automobile européenne subit une période d’incertitude majeure suite à l’instauration par les États-Unis de nouvelles taxes douanières s’élevant désormais à 25 % sur l’importation de véhicules automobiles étrangers, une mesure mise en vigueur par l’administration Trump depuis le 3 avril 2025. Cette décision entraîne une véritable secousse dans le secteur automobile mondial, exacerbée par une réponse forte et rapide du Royaume-Uni pour protéger sa propre industrie. Quels seront les impacts immédiats de ces bouleversements sur l’avenir des constructeurs automobiles français et européens, et sur la stratégie de transition énergétique du continent ?
Une onde de choc en provenance des États-Unis
Depuis sa mise en application, cette hausse brutale des tarifs douaniers américains bouleverse profondément les chaînes de production et la stratégie des constructeurs européens. Pour donner une idée de l’ampleur du phénomène, en 2024, près de la moitié des véhicules vendus aux États-Unis provenaient de l’extérieur du pays, principalement du Mexique, du Canada, d’Allemagne, mais aussi du Japon et de Corée du Sud.
📌 À retenir :
- Hausse des tarifs de 2,5 % à 25 % sur les importations de véhicules.
- Impact direct majeur sur les constructeurs ayant une forte dépendance au marché américain (Volkswagen, BMW, Mercedes, Stellantis).
- Possibles augmentations de tarifs des véhicules pouvant dépasser les 10 000 dollars selon Bank of America.
Face à cette situation inédite, la réponse des constructeurs ne se fait pas attendre : Jaguar Land Rover et Nissan ont déjà décidé de stopper temporairement leurs exportations vers les États-Unis, préférant évaluer leur position avant de s’exposer à d’importantes pertes financières. De leur côté, Stellantis et Ford tentent de préserver leurs parts de marché américain en proposant des offres promotionnelles afin d’amortir la hausse brutale des prix auprès du consommateur.
Le Royaume-Uni contre-attaque : stratégie et pragmatisme
Outre-Manche, la réponse ne s’est pas fait attendre. Keir Starmer, Premier ministre britannique, a décidé de maintenir coûte que coûte l’objectif de fin des ventes de véhicules thermiques neufs dès 2030—une stratégie qui contraste fortement avec les hésitations passées par l’ancienne administration, qui avait repoussé cet objectif à 2035.
Toutefois, Starmer introduit plusieurs mesures pragmatiques :
- Les véhicules hybrides pourront continuer d’être vendus au Royaume-Uni jusqu’en 2035.
- Les constructeurs automobiles haut de gamme en petits volumes (McLaren, Aston Martin) bénéficient d’exemptions partielles sur les exigences de zéro-émission.
- Un plan massif de soutien à l’industrie automobile britannique est lancé, visant à renforcer la production locale et à limiter les pertes d’emplois.
Ce mélange de fermeté sur les objectifs climatiques et de flexibilité stratégique commerciale vise à rassurer les industriels et à éviter une catastrophe industrielle, dans un contexte où près de 25 000 emplois directs seraient menacés rien que pour le marché britannique en raison des nouveaux tarifs américains.
Quels impacts pour l’industrie automobile française ?
Pour la France, le principal enjeu se situe sur la compétitivité internationale de ses constructeurs leaders : Renault et Stellantis se retrouvent directement exposés.
Renault : moins impacté à court terme
Renault, peu présent sur le marché américain, semble provisoirement moins affecté directement par cette hausse tarifaire. Cependant, à moyen terme, la perspective d’une guerre commerciale transatlantique augmentera les pressions concurrentielles sur le marché européen, obligeant Renault à accélérer sa transition technologique vers l’électrification complète, sous peine d’être dépassé par une concurrence mondiale se recentrant sur ses marchés domestiques.
Stellantis : risques et opportunités
Stellantis est davantage affecté, car il produit une partie significative de ses véhicules destinés au marché nord-américain au Mexique et au Canada. Certaines de ses usines en Amérique du Nord ont déjà annoncé des arrêts temporaires de leur production face à l’incertitude tarifaire. Stellantis pourrait cependant profiter de ses unités installées sur le sol américain—notamment celles de la marque Jeep—to reconfigurer partiellement sa stratégie productive.
💡 Conseil d’expert :
Les constructeurs français devraient utiliser cette crise pour renforcer leurs capacités de production européennes et accélérer leurs investissements en faveur des technologies électriques, tout en poussant l’Union européenne à adopter une diplomatie commerciale plus claire et affirmée vis-à-vis des États-Unis.
Et l’agenda européen de la transition énergétique ?
L’enjeu environnemental demeure fondamental, d’autant que l’Union européenne a prévu l’interdiction totale des ventes de véhicules thermiques neufs neufs dès 2035. Or, cette augmentation brutale des tarifs américains pourrait ralentir les investissements des constructeurs européens aux États-Unis et recentrer ces mêmes investissements sur des sites européens. La crise actuelle représente donc potentiellement une opportunité d’accélération de la transition électrique en Europe, à condition que des politiques industrielles solides et ambitieuses soient rapidement mises en place par l’UE et les États membres.
Vers de nécessaires ajustements stratégiques
La situation actuelle appelle des adaptations majeures chez les constructeurs automobiles français et européens :
- Augmentation de la production localisée pour se prémunir des risques tarifaires.
- Diversification accrue des marchés internationaux pour réduire la dépendance commerciale aux États-Unis.
- Révision éventuelle des chaînes d’approvisionnement pour y intégrer davantage d’éléments produits localement, limitant ainsi la vulnérabilité face aux barrières tarifaires.
- Accélération de la transition vers le véhicule électrique, en utilisant la crise comme un levier d’investissements stratégiques sur le sol européen.
Le défi est de taille : entre adaptation industrielle immédiate et stratégie long terme pour une transition énergétique irréversible pour une transition énergétique irréversible, l’année 2025 pourrait être déterminante pour l’avenir de l’industrie automobile européenne. Plus que jamais, le secteur automobile doit démontrer sa flexibilité et sa détermination à s’inscrire dans un modèle durable et compétitif.