En bref:
- Les ventes de Tesla en France et en Europe ont chuté de manière spectaculaire, avec une diminution de 26% en février 2025 par rapport à l’année précédente, due à des facteurs tels que l’attitude d’Elon Musk et une gamme vieillissante.
- Les constructeurs français, tels que Renault et Peugeot, bénéficient de cette situation, renforçant leur part de marché avec de nouveaux modèles compétitifs.
- Malgré les défis de Tesla, le marché français des véhicules électriques devrait continuer de croître, avec des prévisions de parts de marché atteignant 20 à 30% d’ici 2026.
Face à une baisse spectaculaire de ses ventes en Europe et en France, Tesla voit son statut d’acteur dominant du marché électrique remis en question. Cette situation, qui touche particulièrement le constructeur américain depuis plusieurs mois, rebat les cartes du marché français des voitures électriques. Analyse d’un phénomène aux multiples répercussions pour l’industrie automobile hexagonale.
Une chute des ventes sans précédent pour Tesla en France et en Europe
Les chiffres sont éloquents et témoignent d’une tendance de fond : Tesla traverse une période particulièrement difficile sur le marché européen. En France, les ventes du constructeur américain ont chuté de 26% en février 2025 par rapport à février 2024, avec seulement 2 395 véhicules immatriculés. Cette baisse s’inscrit dans la continuité d’un mois de janvier catastrophique, où les immatriculations avaient plongé de 63% par rapport à l’année précédente.
Le phénomène ne se limite pas à l’Hexagone. Dans toute l’Europe, Tesla subit un recul significatif :
- Allemagne : -76,3% en février 2025 avec seulement 1 429 véhicules vendus (contre plus de 6 600 l’année précédente)
- Norvège : -48,4% (917 véhicules contre 1 777)
- Suède : -42,4% (613 véhicules contre 1 064)
- Danemark : -53,1% (509 véhicules contre 1 086)
Ces chiffres interpellent d’autant plus que le marché global des véhicules électriques reste globalement stable en France, représentant environ 18% des ventes totales en février 2025. Il ne s’agit donc pas d’une désaffection générale pour l’électrique, mais bien d’un problème spécifique à Tesla.
Les facteurs explicatifs du déclin de Tesla
L’effet Elon Musk : quand le patron fait de l’ombre à la marque
Si plusieurs facteurs peuvent expliquer cette désaffection, l’attitude et les prises de position du PDG de Tesla, Elon Musk, sont fréquemment citées. Son rapprochement très médiatisé avec Donald Trump, sa présence à des meetings de partis d’extrême droite européens (notamment Alternative für Deutschland en Allemagne) et ses déclarations controversées sur divers sujets politiques semblent avoir aliéné une partie de la clientèle européenne.
En Suède, par exemple, un groupe Facebook de 40 000 membres aurait été créé dans le but explicite de boycotter Tesla. Certains propriétaires américains et européens vont jusqu’à afficher sur leurs véhicules des autocollants portant des messages comme "J’ai acheté ceci avant qu’Elon devienne fou" ou "Elon a tué ma valeur de revente".
Marc Mortureux de la Plateforme automobile française (PFA) souligne : "Il y a eu une redistribution importante en un an, plutôt au bénéfice des constructeurs européens."
Une gamme vieillissante face à une concurrence revitalisée
La gamme actuelle de Tesla, dominée par les Model 3 et Model Y, commence à montrer des signes d’âge face à une concurrence qui se renouvelle rapidement. L’absence de nouvelles propositions majeures depuis plusieurs années joue en défaveur du constructeur américain.
En France, l’arrivée de modèles comme la Renault 5 électrique et la Citroën ë-C3 ë-C3 fin 2024 a permis aux constructeurs français de récupérer des parts de marché significatives. Ces véhicules, proposés à des tarifs plus accessibles, répondent mieux aux attentes d’une partie des acheteurs potentiels.
Le positionnement tarifaire en question
Tesla a longtemps bénéficié d’un rapport qualité-prix très favorable, mais cet avantage s’érode progressivement :
- La réduction des aides gouvernementales en France et en Europe a rendu les Tesla moins abordables
- Les constructeurs chinois comme BYD proposent désormais des véhicules performants à des prix très compétitifs
- Les constructeurs européens ont revu leurs gammes pour offrir des alternatives crédibles
Les conséquences sur le marché français des véhicules électriques
Le retour en force des constructeurs nationaux
Les difficultés de Tesla constituent une opportunité pour les constructeurs français, qui enregistrent des progressions significatives sur le segment des véhicules électriques. Renault et Peugeot affirment leur présence sur leur marché domestique avec des modèles qui séduisent de plus en plus d’acheteurs.
La Renault 5 électrique, lancée fin 2024, rencontre un succès commercial important et incarne le renouveau du constructeur au losange sur ce segment. De même, le groupe Stellantis, avec la Peugeot e-208 et la Citroën ë-C3, renforce sa présence sur le marché français.
Une redistribution des parts de marché
Cette reconfiguration entraîne une redistribution des parts de marché :
- Tesla, qui dominait largement le segment, voit sa position s’affaiblir
- Les constructeurs français reprennent des couleurs sur leur marché domestique
- Les marques chinoises (BYD, XPeng, Leapmotor) gagnent progressivement du terrain avec des propositions compétitives
"Il y a eu une redistribution importante en un an, plutôt au bénéfice des constructeurs européens", souligne Marc Mortureux de la PFA.
Les effets sur la tarification
Face à la baisse de ses ventes, Tesla pourrait être contraint d’ajuster sa politique tarifaire. Cette évolution aurait des répercussions sur l’ensemble du marché :
- Potentielle guerre des prix sur le segment des véhicules électriques
- Accélération de la baisse des tarifs par les autres constructeurs
- Démocratisation accrue des véhicules électriques
💡 À noter : Ces ajustements tarifaires seraient bénéfiques pour les consommateurs, rendant les véhicules électriques plus accessibles à une clientèle plus large.
Perspectives pour 2025-2026 : rebond ou déclin durable pour Tesla ?
Les atouts de Tesla pour rebondir
Malgré ses difficultés actuelles, Tesla conserve des atouts majeurs pour rebondir sur le marché français :
- Une image technologique forte : Tesla reste perçue comme une marque innovante
- Un réseau de superchargeurs étendu : L’infrastructure de recharge Tesla demeure un avantage concurrentiel important
- Des projets de nouveaux modèles : Un modèle plus abordable (possiblement nommé Model 2) est attendu dans les prochains mois
"Tesla n’est pas mort, loin de là", tempère un analyste du secteur automobile. "Le constructeur américain est en phase de transition et pourrait reprendre des parts de marché avec l’arrivée de nouveaux modèles."
Un marché français de l’électrique en pleine croissance
Indépendamment des difficultés de Tesla, le marché français des véhicules électriques devrait continuer de croître fortement en 2025-2026 :
- Les ventes de voitures électriques devraient représenter entre 20 et 24% des ventes de voitures neuves en France en 2025
- Certains experts anticipent même une part de marché pouvant atteindre 30% chez les particuliers
- L’arrivée de nouveaux modèles plus abordables et des mesures incitatives devraient soutenir cette croissance
📊 Prévisions chiffrées :
Année | Part de marché prévue VE |
---|---|
2024 | 18% (réalisé) |
2025 | 20-24% |
2026 | 25-30% |
La concurrence chinoise : une menace grandissante
Si Tesla est actuellement en difficulté, la véritable menace à moyen terme pour les constructeurs français pourrait venir de Chine. Des marques comme BYD, qui a dépassé Tesla en termes de ventes mondiales de véhicules électriques en 2024, multiplient les lancements en Europe avec des modèles très compétitifs.
En Chine, des articles font état d’un changement radical de perception : "Two Cars for the Price of One Tesla" (Deux voitures pour le prix d’une Tesla), peut-on lire dans certains médias locaux. Cette montée en puissance des constructeurs chinois, notamment chez BYD, constitue un défi majeur pour tous les acteurs du marché, y compris les constructeurs français.
L’influence sur la transition énergétique en France
Des objectifs ambitieux maintenus malgré les turbulences
Malgré les difficultés de Tesla, la France maintient ses objectifs en matière de transition énergétique dans le secteur automobile :
- Fin de la vente des véhicules thermiques neufs d’ici 2035
- Déploiement accéléré des infrastructures de recharge
- Maintien (bien que revu à la baisse) du bonus écologique pour soutenir les achats
Le ralentissement des ventes de Tesla ne remet pas en cause la trajectoire générale, mais souligne l’importance d’avoir des acteurs nationaux solides pour assurer cette transition.
L’évolution du bonus écologique : un impact sur l’accessibilité
En 2025, le bonus écologique sera limité à 700 millions d’euros en France, avec des montants réduits par rapport aux années précédentes :
- 4 000 € pour les ménages modestes
- 3 000 € pour les revenus intermédiaires
- 2 000 € pour les revenus plus élevés
Cette évolution impacte l’accessibilité des véhicules électriques, et notamment des Tesla, dont les modèles sont généralement positionnés sur les segments moyens et supérieurs du marché.
Des leçons à tirer pour l’ensemble du secteur automobile
Les difficultés de Tesla sur le marché français et européen illustrent plusieurs tendances profondes du secteur automobile :
- L’importance de l’image de marque : Les controverses liées au dirigeant peuvent avoir un impact direct sur les ventes
- La nécessité d’un renouvellement régulier des gammes : Même une marque innovante comme Tesla ne peut se reposer sur ses acquis
- L’ancrage local compte : Les constructeurs nationaux bénéficient d’un avantage sur leur marché domestique, à condition de proposer des modèles adaptés
- Le prix reste un facteur déterminant : Malgré l’attrait pour les nouvelles technologies, le positionnement tarifaire demeure crucial
La situation actuelle de Tesla en France constitue un cas d’étude intéressant pour l’ensemble du secteur, illustrant comment une position dominante peut rapidement s’éroder face à l’évolution des attentes des consommateurs et à une concurrence dynamique.
Le ralentissement des ventes de Tesla en France ne marque pas la fin de l’aventure du constructeur américain dans l’Hexagone, mais ouvre une période de redistribution des cartes sur un marché des véhicules électriques en pleine structuration. Dans cette nouvelle donne, les constructeurs français semblent bien positionnés pour tirer leur épingle du jeu.